Métabolisme territorial normand
Synthèse du métabolisme territorial normand
Le métabolisme territorial représente l’ensemble des flux de matières nécessaires au fonctionnement d’un territoire, qu’ils soient importés, transformés, transportés, exportés ou rejetés dans l’environnement.
Pour faciliter la réalisation et l’actualisation de ce travail dans le temps, un guide méthodologique national a été élaboré en juin 2014 par le commissariat général au développement durable en collaboration avec l’ADEME, intitulé « comptabilité des flux de matières dans les régions et les départements ». En s’appuyant sur l’initiative de la région Bourgogne : il propose une déclinaison territoriale de la méthodologie d’Eurostat pour construire une comptabilité de flux de matières dans les régions et les départements français.
Le but de cette étude est d’illustrer le système socio-économique normand pour essayer de déterminer les principales forces et faiblesses, ainsi que les caractéristiques de ce territoire. Dans un second temps, ce travail permettra d’établir une série d’indicateurs (un suivi de performance) liés à l’utilisation des ressources et de fournir une aide précieuse à la décision de façon à orienter les stratégies en lien avec la transition écologique le plus efficacement possible.
Néanmoins, cette analyse des flux de matière porte sur un principe purement quantitatif, ce qui engendre plusieurs limites comme le risque de ne pas mesurer certains enjeux. Elle ne prend pas en compte la circulation des matières au sein du territoire, tout comme les flux d’eau et d’énergie qui nécessite des études complémentaires. C’est la raison pour laquelle la réalisation de ce métabolisme constitue un point zéro de la vision territoriale et doit être poursuivie par des analyses complémentaires plus ciblées, pour optimiser l’utilisation de cet outil.
Les indicateurs suivants proviennent du guide méthodologique national et porte sur l’analyse du métabolisme territorial normand réalisé pour l’année 2022.

Cette représentation reprend les grands indicateurs du métabolisme territorial, avec les entrées sur le territoire (extraction de matières, importations, flux d'équilibrages), les sorties (émissions vers la nature, exportations, flux d'équilibrages) ainsi que le stock de matières. La partie « recyclage et valorisation » est indiquée sur le graphique bien qu’elle ne soit pas considérée comme une entrée ou une sortie. On retrouve les émissions vers la nature, au-dessus de la région afin de rappeler la prépondérance des émissions dans l’air.
La différence entre les entrées et les sorties de matières permet de mesurer l’addition nette au stock qui sera additionnée au stock existant sous forme d’infrastructures diverses.
Ce synoptique a pour objectif de vulgariser les résultats et de constituer une illustration globale du système socio-économique normand. À travers ce dernier, nous sommes en capacité de dresser un bilan complet du territoire normand en indiquant les quantités par type de flux et exprimées en millions de tonnes. Ce bilan a permis de mettre en évidence des flux de matières à forts enjeux (risques d’approvisionnement, résilience territoriale, importance de la région à l’échelle nationale…) et de potentielles incohérences comme l’importation de matières présentes en Normandie.
Comme évoqué précédemment, plusieurs conclusions peuvent être mises en évidence avec cette illustration.
Premièrement, ce travail conforte la place extrêmement importante de la filière agricole et de la construction dans la mobilisation de matières sur le territoire. En effet, la biomasse issue de l’agriculture et les minéraux non-métalliques, majoritairement destinés au secteur de la construction, représentent à eux deux 95 % des extractions intérieures utilisées (près de 39 Mt) en Normandie. L’analyse des flux associés à l’extraction de matières a également mis en évidence la part surprenante (47 %) des extractions de matières dites inutilisées au sens socio-économique du terme. Ce sujet mériterait d’être creusé pour déterminer la part réellement valorisable de ces extractions. Par exemple, une partie des résidus de récolte agricoles est considérée comme inutilisée, alors que son rôle est primordial pour la régénération des sols.
Deuxièmement, une forte prépondérance des importations de combustibles fossiles (31,9 Mt soit 46 % des importations normandes) impactant fortement la balance commerciale physique normande a été identifiée. Cette forte dépendance est principalement due à l’aspect industriel de la région, notamment l’axe Seine accueillant plusieurs raffineries importantes. Au total, en 2022, 70 Mt de matières ont été importées en Normandie, nettement plus que les 52 Mt de matières exportées sur la même année.
Enfin, le troisième point qui ressort de ce bilan porte sur le poids des émissions de matières vers la nature, largement dominées par les émissions de polluants dans l’air. Au total, la pollution atmosphérique représente 74 % des émissions vers la nature. Ces dernières sont principalement issues des activités humaines présentent sur le territoire, notamment les activités industrielles. Les émissions de CO2 représentent à elles seules 54 % des émissions totales, et 74 % des émissions dans l’air en Normandie.
Pour conclure, ce travail permet d’illustrer le système socio-économique normand sur une année donnée en mettant en avant ses besoins, ses dépendances, ses forces, faiblesses, etc. Son actualisation à intervalle régulier permettra de mettre en évidence l’évolution des flux de matières normands et de dépasser les limites méthodologiques identifiées lors de la première réalisation de cette analyse de flux de matières.
Indicateur besoins de matières
Le besoin apparent en matières (DMI) représente l’ensemble des matières entrantes directement et physiquement dans le système socio-économique étudié afin de répondre à la demande intérieure et à la production destinée à l’exportation.
Il se mesure en additionnant l’extraction intérieure utilisée (biomasse agricole, biomasse sylvicole, biomasse aquatique, biomasse issue de la chasse, minerais métalliques, minéraux non-métalliques et combustibles fossiles) et les importations de matières premières, de produits semi-finis et produits finis.
À l’échelle régionale, ce besoin représentait 108,8 Mt soit 32,8 t/hab. en 2022. En comparaison ce besoin s’élevait à 21 t/hab. à l’échelle nationale sur la même période.
Le besoin total en matières (TMR) représente l’ensemble des matières mobilisées par le système socio-économique, en additionnant la totalité des extractions intérieures (utilisées et inutilisées) et les flux indirects (ou « cachés ») afin de prendre en compte l’impact global des produits importés sur le territoire.
En 2022, ce besoin est estimé à 352,8 Mt soit plus de 3 fois le besoin apparent en matières et 106,4 t/hab., tandis qu’à l’échelle nationale ce besoin équivaut à 72,5 t/hab.
Consommations de matières
La consommation intérieure apparente de matières (DMC) représente l’ensemble des matières consommées par le système socio-économique étudié.
Cet indicateur se mesure en soustrayant les exportations au besoin apparent de matières (DMI) afin de prendre uniquement en compte la matière consommée sur le territoire. Cette consommation représente 17 t/hab. en Normandie, légèrement supérieur aux 14 t/hab. à l’échelle nationale.
Lorsqu'on ajoute les flux indirects, la consommation intérieure totale de matières (TMC) augmente drastiquement, passant à 30 t/hab. en Normandie et 24 t/hab. en France, pour l’année 2022.
Indicateurs productivité et intensivité matière
Ces deux indicateurs économiques mettent en relation la production de richesse (la création d’une unité de valeur ajoutée au PIB) et la quantité de matière consommée (DMC).
L’intensité matières indique la quantité de matières associée à la création d’une unité de valeur ajoutée brute. Pour l’année 2022, en moyenne, 580g de matières sont nécessaires à la création d’1 € de valeur ajoutée. A l'échelle nationale, on estime ce besoin à 380g de matières.
La productivité matières représente la quantité de valeur ajoutée brute par tonne de matières utilisées. En Normandie, on estime cette productivité matière à 1 730 € de valeur ajoutée pour une tonne de matière, alors qu’à l’échelle nationale, elle s’élève à 2 610 € pour une tonne.
L’augmentation de la productivité matière de 30 % entre 2010 et 2030 fait partie des objectifs de la loi relative à la transition écologique pour une croissance verte (LTECV).